La plante

31 octobre 2010

Elle a choisi un chrysanthème boule, blanc. Il attendait depuis quelques jours sur la terrasse qu'elle se décide.
Des gouttes de pluies s'étaient accrochées à ses pétales. J'ai lu quelque part toute la symbolique de cette fleur emblème de la famille impériale du Japon. Les nuages étaient bas et lourds, l'air humide aux senteurs de feuilles mortes. Il était temps.
Elle s'est éloignée, la plante au bout de son long bras balançaient ses gros pompons dans un mouvement presque risible. Ses chaussures faisaient crisser le gravier de l'allée. Ses jambes interminables donnaient l'impression de vouloir fuir plutôt que de la soutenir.
J'ai regardée, émue, sa silhouette frêle et sombre s'arrêter devant un parterre de fleurs qu'une petite croix en bois surplombait.1992-2010 en lettres dorées.
Elle s'est penchée, à déposer prestement la plante dans cet arc-en-ciel fleuri Les pompons ont eu l'air de se redresser, les gouttes de pluie comme des petits brillants la rendaient encore plus belle. Elle avait trouvé sa place, portant un peu du chagrin de celle qui venait de la confier à ce morceau de terre.
Ses mains se sont enfoncées dans son caban. Elle a froncé les sourcils, plissé les lèvres puis murmuré des mots qui me resteraient secrets...Immobile comme incrédule.
Elle est revenue vers moi, les yeux brillants et le visage pâle.Elle a passé son bras sous le mien en silence comme elle adore le faire. Elle s'appuie dessus légèrement, je sens son parfum et quand je lève la tête vers elle ses cheveux longs me chatouillent parfois le nez. A première vue on a l'air ridicule elle si grande au bras gauche (toujours) de sa maman si petite! Mais j'aime...c'est comme si je tenais encore la main de ma petite fille...
On ne devrait pas s'incliner sur la tombe d'un ami lorsqu'on a 18 ans...